Le vélo comme outil d’aventure avec Robin Early
Quand Robin Early arrive pour enregistrer ce podcast, il sort tout juste de 140 km de gravel sur les chemins cassants du Roc d’Azur. “Je suis un peu fatigué quand même”, dit-il avec le sourire.
Normal : la veille, il avait déjà avalé 70 km dans les Estérelles. Mais Robin ne fonctionne pas vraiment comme les autres. Ou plutôt : il fonctionne autrement, comme ceux qui ont trouvé dans le vélo un moyen d’explorer le monde… et eux-mêmes.
👉 Dans cet épisode, il raconte comment il est passé du bikepacking subi aux ultras choisis, de la recherche de sensations fortes à la quête d’équilibre mental, du sport collectif à la solitude inspirante des grands cols. Sans filtre, sans posture, avec cette sincérité qui fait sa marque.
Du bikepacking « enfer » aux premières étincelles
Le vélo, chez Robin, commence là où beaucoup de passions naissent : dans l’enfance, avec un parent qui transmet. Son père l’emmène chaque année sur une semaine de bikepacking. Et l’idylle… n’y est pas tout de suite. “J’appréciais peut-être les 20 premiers kilomètres du premier jour. Après, je voulais rentrer à la maison. Je simulais même des blessures.”
Pourtant, malgré l’effort, malgré les 8 heures quotidiennes de selle et les hypoglycémies à répétition, quelque chose reste : la nature, la liberté, le moment complice.
👉 Il ne le sait pas encore, mais ces souvenirs poseront les premières pierres de sa passion future.
Du tennis de table au volley : naissance du mental
Avant le vélo, il y a eu sept ans de tennis de table, à haut niveau national. Un sport qu’il décrit parfaitement : “Le mental, c’est un délire.”
Puis vient le volley, où il découvre la dynamique d’équipe et vise même une carrière pro. Mais un problème persiste : la progression dépend trop des autres. Il veut travailler, s’entraîner, avancer. À son rythme. À sa manière.
Arrive alors ce moment pivot pour toute une génération : le Covid.
Les gymnases ferment, les entraînements cessent, mais Robin refuse de rester immobile. Il monte sur le vélo, la nuit, dans un rayon d’un kilomètre, enchaînant les allers-retours jusqu’à 2h du matin. “Je me faisais mal mentalement, mal physiquement… et ça me plaisait.”
Le moteur se met en route.
Le goût de l’ultra : vivre une année en une course
Ce qui le fait basculer vers l’ultra, ce ne sont ni les chiffres ni les podiums. C’est l’intensité émotionnelle. “Dans un ultra, tu vis en 24h ce que tu vis en un an de vélo.”
Le gravel lui offre ce qu’il cherchait : du technique, des doutes, des émotions, du physique… et des moments de grâce absolue. Son 400 km / 10 000 m D+ des Géants, à Annecy, le marquera profondément.
Dans la nuit, au milieu des reliefs, il craque mentalement : “Je m’allonge, j’appelle ma copine, j’ai envie de pleurer… mais je n’y arrive même pas.”
Puis, quelques heures plus tard, à l’heure bleue dans la montée vers les Saisies, tout bascule. “Là, t’es le roi du monde. T’as le monde à tes pieds.”
Et il repart. Toujours.
Sur le fil : quand le mental lâche pour de bon
Il y a pourtant un moment où la courbe ne remonte pas. Lorsqu’il tente les 7 Majeurs, enchaînement des sept plus grands cols d’Europe, il frappe sa limite.
Manque de sommeil, météo infernale, chute violente dans une descente… et la peur. “Là, j’ai tapé ma limite. Je suis monté dans le van, et j’étais heureux. Parce que je l’avais trouvée.”
Ce jour-là, il découvre que l’ultra n’est pas une fuite vers “toujours plus”, mais un dialogue permanent avec soi-même. Trouver la limite, mais ne pas la dépasser. L’apprivoiser. La respecter.
Le vélo : sport individuel… profondément collectif
Robin aime rouler seul. Il aime rouler à deux. Il aime rouler avec des potes. Mais il n’aime pas les grands pelotons où tout le monde se bouscule. Pour lui, le vélo n’est pas “individuel” : c’est un sport d’entraide. “Dans un ultra, tu peux vivre un moment infernal avec un inconnu… et devenir presque meilleurs amis.”
Comme ce gars rencontré de nuit, sur les Géants : “On était dans la merde ensemble… je crois que je lui ai dit deux fois que je l’aimais !”
L’ultra crée des liens que rien d’autre ne crée.
Parce que tout y est plus fort : les hauts, les bas, les peurs, les paysages, les silences.
Pourquoi partager tout ça ?
Ce qui anime Robin sur les réseaux n’a rien à voir avec la performance ou les chiffres. “Je voulais prouver que mon sport était stylé.”
Mais à force de partager ses sorties, ses émotions, ses galères et ses réussites, il découvre un impact auquel il ne s’attendait pas.
Un jour, un message le bouleverse :
Un jeune lui écrit que ses vidéos l’ont empêché de mettre fin à ses jours — et que le vélo l’a sauvé. “J’ai pleuré. Je me suis dit : si tout ça sert à une seule personne, alors ça vaut mille fois le coup.”
👉 Là est sa mission : donner envie aux gens de sortir, d’essayer, de découvrir ce qu’ils ont au bout de la rue.
Rouler pour vivre plus fort
Robin Early roule loin, roule longtemps, roule haut. Mais surtout : il roule vrai.
Pas pour les chiffres. Pas pour les looks. Pas pour les records.
Pour les paysages, les sensations, les rencontres, les limites… et tout ce qui se passe entre les deux.
Pour ce moment où, après 16 heures de nuit, le jour se lève et tu te dis : “Ça valait tout.”