Aurélien Fontenoy : immersion dans le monde du VTT trial
Il a gravi la Tour Eiffel… en VTT. Oui, vous avez bien lu : 686 marches, 12 minutes 30, sans poser le pied au sol. Ce défi un peu fou, Aurélien Fontenoy l’a relevé avec une décontraction typique des gens du Sud : « Le Rock d’Azur, c’est l’événement incontournable de fin de saison… et il fait beau dehors ! » plaisante-t-il au micro du podcast Dans la tête d’un cycliste.
Mais derrière le sourire et la légèreté du propos, il y a une discipline exigeante, une vie de rigueur, et un mental forgé à la répétition : bienvenue dans le monde du VTT trial, ce sport aussi spectaculaire qu’intransigeant.
Quand le vélo devient une extension du corps
« Le VTT trial, c’est simple : il faut franchir des obstacles sans jamais poser le pied au sol. » Simple à dire, beaucoup moins à faire. Sur son vélo sans selle, ultra léger, Aurélien se déplace de saut en saut, freins bloqués, comme un funambule mécanique.
Pas de pédales automatiques ici : « Je n’ai pas les pieds attachés, juste des pédales plates avec des picots. Le vélo, c’est la continuité de mon corps. »
Cette vision quasi organique de sa machine, il la cultive depuis l’enfance. C’est son grand frère qui lui fait découvrir la discipline : « On faisait déjà des wheelings dans le quartier, des marches à monter. On ne savait même pas que c’était un sport ! »
À huit ans, il rejoint un club près de Grenoble, l’un des plus dynamiques de France et se met à apprendre les bases : tourner autour d’un arbre, franchir un caillou, puis un mur. Très vite, il se prend au jeu : « Mon frère me battait toujours au début. Puis, petit à petit, j’ai commencé à le rattraper… puis à le dépasser. »
L’art de tomber cent fois pour réussir une seule
Le VTT trial, c’est un sport d’obstination. « Tu rates cent fois avant d’y arriver une fois, » résume-t-il.
Cette logique de répétition, proche de celle du saut en hauteur, forge un mental de fer. Adolescent, Aurélien passe des heures sur son vélo : « J’étais le premier arrivé, le dernier parti. Mon père venait me chercher à la nuit tombée, je voulais juste réussir mon mur. »
Cette rigueur l’accompagnera toute sa carrière. Pas de hasard, pas de raccourci : le progrès passe par la persévérance. « T’as beau avoir du talent, si tu ne répètes pas, tu n’y arriveras pas. C’est la répétition qui t’amène à comprendre la technique. »
👉 C’est cette philosophie qui fera de l’enfant de Grenoble un multiple champion du monde.
Le champion qui préférait prendre des risques
Aurélien aime le risque mesuré, celui qui sépare les audacieux des calculateurs. Il raconte avec fierté le jour où, en championnat d’Europe junior, il a tout tenté sur un franchissement jugé impossible : « Mon adversaire avait assuré, moi j’ai tout misé. Si je tombais, je finissais quatrième. Mais j’ai réussi. Il levait déjà les bras, et moi je gagne. »
Le trial, c’est aussi ça : une danse entre maîtrise et audace, où le moindre faux mouvement se paye comptant.
En compétition, les pilotes ont deux minutes pour franchir un parcours d’obstacles sans poser le pied. Chaque “porte” rapporte des points, et il faut savoir choisir entre viser haut ou assurer. « C’est stratégique, mais je préfère mériter ma victoire plutôt que tricher avec un pied posé, » confie Aurélien.
Derrière les titres, une passion forgée à la sueur
Avant les podiums, il y a eu les larmes. « Mon premier championnat du monde, je finis dernier. J’étais en pleurs. »
Mais d’année en année, il grimpe : dernier, dixième, sixième, troisième… jusqu’à la victoire. Une progression lente, patiente, mais solide. « Je n’ai pas gagné mes titres tout de suite. C’est ce qui les rend précieux. »
Cette passion, il la vit à fond, quitte à faire quelques sacrifices. Pas de soirées entre amis, pas de vacances d’été : « Jusqu’à mes 25 ans, je n’ai pas connu les vacances. Mes potes allaient en boîte, moi j’étais en compétition. »
Pour lui, ce n’est pas une privation, mais une évidence : « C’était ma locomotive. J’ai voyagé, j’ai vécu de ma passion. C’est une autre jeunesse, mais une belle jeunesse. »
Un sport spectaculaire… mais peu lucratif
Si le VTT trial est visuellement impressionnant, il reste économiquement fragile.
« Quand j’ai été champion du monde, j’ai gagné 666 euros, » raconte-t-il en riant. Même aujourd’hui, les primes plafonnent à 1000 euros par victoire. « Tu fais trois Coupes du monde et un championnat du monde… tu gagnes 13 000 euros dans l’année. C’est compliqué. »
Les sponsors sont rares, les marques souvent spécialisées, et les subventions limitées.
🎯 Résultat : beaucoup de jeunes arrêtent tôt. Mais Aurélien, lui, trouve un autre moyen de continuer à vivre de son sport : les shows de démonstration. « J’ai créé ma société, j’ai aménagé mon camion, mes modules, mon son. Je me déplace partout pour faire découvrir le trial. C’est spectaculaire, c’est vivant, les gens adorent. »
Du trial aux réseaux : le funambule devient créateur
Quand la compétition s’arrête, le défi reste. Aurélien trouve dans la vidéo un nouveau terrain d’expression. « Ma première vidéo date de l’époque Dailymotion ! On aimait déjà se filmer, pas pour faire des vues, mais pour partager. »
Aujourd’hui, ses exploits font le tour des réseaux : roues sur des ponts, sauts entre immeubles, montées impossibles… toujours avec un goût certain pour le spectaculaire.
Mais derrière les millions de vues, il y a la même mentalité : le défi, la peur, le dépassement. « Quand je saute entre deux immeubles, c’est comme en compétition : je veux savoir si j’ai le mental pour le faire. Et quand j’arrive de l’autre côté, les sensations sont incroyables. »
Prochain défi : le plus haut gratte-ciel du monde
Toujours à la recherche de nouveaux sommets (littéralement), Aurélien rêve désormais de la tour Burj Khalifa, à Dubaï. « Un Italien a mis 2h20 pour la grimper. C’est trois ou quatre fois la Tour Eiffel, mais je pense que c’est faisable en moins de deux heures. »
Derrière la performance, il y a surtout un projet titanesque : 10 % de vélo, 90 % d’organisation. « C’est des mails, des autorisations, de la logistique… mais c’est ça aussi, le vrai travail invisible derrière les défis. »
Un message simple : la passion avant tout
Quand on lui demande ce qu’il dirait à un jeune qui débute, la réponse fuse :
« Faut pas faire ça pour être champion du monde. Faut le faire parce que t’aimes ça. Si t’es passionné, t’auras la patience, la rigueur et le courage d’aller au bout. »
👉 Et c’est peut-être ça, le plus beau message d’Aurélien Fontenoy : qu’il s’agisse d’un mur à franchir, d’un record du monde ou d’une marche de la Tour Eiffel, tout commence par une chose simple, l’envie d’essayer, encore et encore.